Méditation avec Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu du Dr H-M Boudon : 26 juillet
DEUXIÈME TRAITE
CHAPITRE VI
De l'espérance de la très sainte Vierge
Comme la manière de prêcher de ce Père était fort spirituelle, il n'était pas goûté de plusieurs : mais j'ai connu des âmes appelées à la perfection, qui en étaient touchées d'une manière très puissante.
Ses paroles leur étaient comme des charbons ardents qui les mettaient tout en feu, en sorte que pendant ses sermons elles avaient bien de la peine à se contenir, et à ne pas faire paraitre au dehors le feu sacré qui les consumait intérieurement.
Elles eussent voulu crier, voilà un homme admirable : et la grâce qu'elles en recevaient, était telle, que dès lors qu'il montait en chaire, et qu'il commençait à faire le signe de la croix, elles étaient toutes transportée par les impétuosités sacrées du divin amour.
« Ô mon Dieu ! Que vos conduites sont admirables ! Pendant qu'un homme n'est pas goûté de plusieurs, pour ses expressions qui paraissent trop spirituelles, vous vous en servez pour perfectionner les âmes qui vous sont les plus chères. »
Ce bon Lorrain était tourmenté visiblement des démons, qui lui apparaissaient en des figures différentes, et qui semblaient, quelquefois, renverser toute sa chambre ; quelquefois ils lui parlaient, tâchant de le décourager, lui disant qu'il n'avait rien fait pour Dieu, et, d'autres fois, ils usaient de menaces pour l'intimider.
Son oraison était presque continuelle, ce qui l'obligeait d'aller, de grand matin, dans de certaines cavernes proche Paris, et y passer toute la journée en contemplation, ne mangeant, quelquefois, qu'un peu de pain le soir.
Je l'ai vu, quelquefois, lorsque nous allions à la promenade, retourner sur ses pas sans dire mot à la compagnie, en sorte que l'on était tout étonné de ne le plus voir, l'application continuelle qu'il avait à Dieu ne lui permettant pas les moindres divertissements avec les créatures.
Ce n'est pas que, dans les rencontres, il ne fût fort gai, et d'une agréable conversation. Ayant été prié en quelqu'un des jours gras d'aller manger chez un de ses meilleurs amis, et s'en étant voulu abstenir, par mortification, au retour de l'église de Notre-Dame, où il avait passé quelque temps en oraison devant la très-sainte Vierge, sa bonne mère et maîtresse.
Il fut grandement étonné de trouver plusieurs mets délicieux, apprêtés sur sa table et sur une nappe bien blanche, et comme il eut peur, de prime abord, que ce ne fût une illusion, il eut recours à la prière.
Mais, voyant que ces viandes demeuraient toujours, il en mangea avec bénédiction, et fit un excellent repas, le reste qui accompagnait les viandes disparaissant, tant il est vrai que le Seigneur est bon à ceux qui l'aiment, ne leur donnant pas seulement le nécessaire, mais l'agréable, comme il fit dans les noces de Cana, en Galilée.
L'élévation de son esprit en Dieu ne lui laissant pas l'usage libre de tous ses sens, il lui est arrivé plusieurs fois d'être renversé par terre, dans les rues, par les carrosses, qui le blessaient notablement, et, n'ayant point d'autre médecin ou chirurgien que la divine Providence, il se trouvait tout à coup guéri.